COLZA + CONCENTRÉ DE LUZERNE : UNE ALTERNATIVE AU SOJA

COMPARÉ À UN TOURTEAU DE SOJA 49, le tourteau de colza gras, associé à un concentré de luzerne, donne plus de lait, un TB plus faible et un TP équivalent. Le profil en acides gras et la qualité fromagère du lait sont améliorés. La substitution se fait à coût équivalent. Telles sont les conclusions d'une première série d'expérimentations conduites l'hiver dernier à la demande des filières AOC de Bourgogne (époisses...). Trouver un approvisionnement tracé en soja garanti non-OGM devient de plus en plus difficile. De plus, outre la forte volatilité de ses prix, le soja importé présente un impact énergétique négatif. Réalisés dans le cadre du pôle laitier régional de Bourgogne, avec l'appui de l'Institut de l'élevage, les essais ont été menés sur le troupeau du lycée agricole de Fontaines, en Saône- et-Loire. Pendant dix semaines, deux lots de vingt-quatre montbéliardes en milieu de lactation (huit primipares, seize multipares) ont reçu quotidiennement la même ration de base : deux tiers de maïs ensilage, un tiers d'ensilage d'herbe, foin de luzerne dactyle et paille de blé. Les apports en concentrés étaient équivalents en azote et en énergie.

Alors que 2,4 kg de blé et 2 kg de soja 49 étaient distribués au lot témoin, le lot expérimental recevait 2,2 kg de blé, 0,84 kg d'Extraluz et 1,86 kg de tourteau de colza Expellor. Fabriqué par la coopérative Extrusel en Saône-et-Loire, ce dernier titrait 33,4 % de protéines et 10,9 % de matière grasse. Il affichait une valeur de 1,07 UFL/kg de MS avec 221 g de PDIN et 138 g de PDIE.

Produit dans la Marne par la société Desialis, le concentré de luzerne Extraluz dosait 54,3 % en protéines et 5,6 % de matière grasse, avec une valeur de 1,26 UFL/kg de MS, 488 g de PDIN et 461 g de PDIE.

EFFET DILUTION SUR LE TB

À l'issue de l'essai, le lot expérimental est le meilleur pour tous les critères. En production laitière, l'association colza- Extraluz se traduit ainsi par un gain de 2 kg de lait par jour. Sous l'effet dilution, le TB baisse de 2,2 g/kg. Sur ces deux points, les primipares et les multipares réagissent de la même façon. Sur la matière protéique, on note un TP significativement plus faible chez les multipares du lot expérimental (31,5 g/kg de MS contre 32,7 g/kg). Toutefois, compte tenu de la production laitière supérieure, la quantité de matières protéiques produites par le lot expérimental est supérieure à celle du lot témoin (884 g/j contre 829 g/j).

Ingérée en quantité un peu supérieure (15,4 kg de MS fourrage et 5,2 kg de concentré contre 15,3 kg de MS fourrage et 4,74 kg de concentré), la ration expérimentale (3,82 % de MG) s'est montrée plus efficace avec 1,35 kg de lait brut/kg de MS, contre 1,28 pour la ration témoin (2,61 % de MG).

Aucun écart significatif de la qualité cellulaire n'a été noté. Avec un taux d'urée légèrement inférieur (0,26 en moyenne sur six analyses, contre 0,31 pour le lot témoin) et un rapport TB/TP plus faible pour le lot expérimental, la qualité fromagère des laits semble avantagée. Le taux de calcium est équivalent. Au plan nutritionnel, le profil des acides gras est amélioré par l'utilisation du colza et de la luzerne : baisse des saturés, augmentation des insaturés, amélioration du rapport oméga 6/oméga 3 (4,25 au lieu de 7).

FAVORABLE COMPARÉ À DU SOJA NON-OGM

Au plan économique, les coûts d'alimentation(1) ramenés à la production laitière sont sensiblement identiques. Le calcul a été effectué sur la base des tarifs non contractuels suivants : 316 €/t pour le soja standard, 235 €/t pour le colza Expellor, 550 €/t pour la luzerne Extraluz, 120 €/t pour le blé. Si l'on tient compte du fait que la comparaison a été faite par rapport à du soja standard et non garanti non-OGM, plus onéreux, le rapport économique est en fait plus favorable au mélange colza-Extraluz.

L'expérience va être poursuivie cet hiver avec une luzerne différente, un concentré titrant 26 % de MAT, produit à partir des seules feuilles de la légumineuse. Fabriqué par la coopérative de déshydratation de Baigneux- les-Juifs, en Côte-d'Or, ce produit moins technique mais plus local qu'Extraluz sera testé à partir de janvier 2010. « Les éleveurs disposeront ainsi d'une offre élargie en correcteur azoté alternatif », souligne Georges Risoud, du Syndicat de défense de l'époisses AOC.

ANNE BRÉHIER

(1) Coût de la ration de base + coût de complémentation au 15-12-09..